Pour la mise en place d’une Economie Sociale et Solidaire (ESS) dans le domaine de l’écotourisme communautaire – Manuel pratique

par Catherine Virassamy, Programme de coopération PAJE (Programme d’Appui Jeunesse et Emploi) 2019


[1] Source geo.fr https://www.geo.fr/environnement/ecotourisme-41139

Depuis le début des années 1970, le tourisme est l’industrie qui connaît une des plus fortes croissances à l’échelle de la planète. Le tourisme de masse qu’il induit pose incontestablement la question du développement des communautés locales et de la protection de l’environnement largement affectés par ses effets négatifs. L’écotourisme, affichant depuis les années 1990 une croissance annuelle comprise entre 20 % et 34 %[1], apparaît ainsi comme une solution alternative capable de concilier le développement économique, la protection de l’environnement et le bien-être des communautés. Il constitue notamment une opportunité d’activité pour les jeunes déscolarisés ou les membres d’une communauté de détenteurs informels de savoir-faire, par les métiers diversifiés qu’il offre avec comme principale exigence de bien connaître son territoire pour en devenir « un ambassadeur ». L’économie sociale et solidaire par sa dimension collective, économique et sociale, apparaît comme le cadre ad hoc pour l’élaboration de tels projets via des associations, des ONG, des coopératives ou des fondations en portage ou accompagnement.

Source de revenus directs pour les personnes, l’écotourisme est appréhendé comme une opportunité de développement local, de diversification économique et de lutte contre la pauvreté pour les populations locales notamment les femmes ou les jeunes, à l’instar du tourisme de masse. A travers cela, il est un instrument de sauvegarde et de valorisation du patrimoine culturel matériel au sens de la Convention de l’UNESCO du Patrimoine Mondial revendiquant les notions de protection de la nature et de préservation des biens culturels, reconnaissant l’interaction entre l’être humain et la nature et le besoin fondamental de préserver l’équilibre entre les deux. Il l’est aussi au sens de la Convention de l’Unesco de Sauvegarde du Patrimoine Culturel Immatériel (PCI) indiquant de respecter un ensemble de mesures formant une chaîne de traitement patrimonial afin d’assurer la viabilité effective du PCI : identification et recensement, documentation, étude et recherche, protection, transmission par l’éducation formelle et non-formelle, valorisation et revitalisation. Bien que fragile, le PCI est considéré comme un facteur important du maintien de la diversité culturelle face à la mondialisation croissante. Par la connaissance des pratiques et des communautés qu’il favorise, le PCI encourage le respect d’autres modes de vie. La préservation et valorisation du patrimoine culturel au sens large, matériel, immatériel et environnemental présentent à ce titre une des conditions de mise en œuvre l’écotourisme au service des communautés locales.

Dans ce mouvement d’aspiration écologique, une nouvelle génération de voyageurs souhaite découvrir les territoires autrement en partageant la culture des communautés hôtes, à l’inverse d’une posture à sens unique de touriste consommateur classique.

Les Pôles d’économie du patrimoine

Catherine Virassamy et Karim Mosbah, Territoires en mouvement, La Documentation Française, DATAR 2002
Les territoires se tournent aujourd’hui, après quelques dizaines d’années de modernisation
parfois brutale, vers leur identité et se redécouvrent riches d’un patrimoine original.
Cet héritage culturel, historique, artistique ou technique distingue les territoires les uns
des autres et sert de contrepoids aux effets négatifs de la mondialisation. Les éléments
constitutifs de ce patrimoine culturel et naturel représentent des ressources au même titre
que les matières premières, l’industrie ou les services. Ils sont autant de potentialités de
développement économique, historique et culturel.
La démarche des pôles d’économie du patrimoine (PEP) initiée par la DATAR à la suite du
Comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire (CIADT) de Troyes en 1994, a pour objectif d’utiliser le patrimoine diversifié de la France comme levier du développement économique. Les PEP doivent aider à transformer les potentialités qu’il recèle en activités et en emplois.
Ils ne s’apparentent ni à une structure, ni à une ligne budgétaire particulière, ni à un label, mais à un processus qui vise à mettre en réseau des initiatives locales en vue de créer du développement économique. La valorisation des ressources patrimoniales possède un effet d’entraînement sur de nombreux secteurs : le tourisme, le bâtiment, les productions industrielles traditionnelles de grande qualité, l’artisanat d’art et autres savoir-faire, les
emplois liés à l’amélioration du cadre de vie et de l’environnement.
Les pôles d’économie du patrimoine sont nés d’un pari. Pari sur des gisements d’activités liés à l’engouement pour le patrimoine, à des productions de qualité, aux métiers de services aux habitants (vie culturelle, cadre de vie). L’expérience montre que les projets des PEP requièrent des métiers à haute valeur ajoutée intellectuelle : métiers de la culture,
de la communication, mais aussi d’ingénierie des procédures financières et institutionnelles.
En privilégiant la culture, l’innovation, la mutualisation dans le sens de l’intercommunalité, en produisant de la différence, les PEP sont au cœur du mouvement de recomposition des territoires engagé par la loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999. Fruit de l’expérience de la trentaine de PEP en marche, cet ouvrage tente de donner les clés de réussite pour l’engagement des territoires dans
cette démarche.